FLORHOF
Exposition a la DRAC de Bordeaux
du 17 juin au 2 juillet 2021
Propos de FLORHOF 4 :06 s clique sur l'image:
BILLGRABEN associe l’art contemporain à l’art du Feng Shui. Le Feng Shui est un art taoïste, au même titre que le Tai Chi Chuan, la médecine traditionnelle chinoise ou l’acupuncture. C’est l’art de se positionner dans le temps et l’espace pour être en harmonie avec son environnement. Il utilise comme sources d’énergie, les flux du vent et de l’eau, les montagnes, la vibration des lieux et des objets, comme un langage.
Le principe de BILLGRABEN a comme point de départ l’utilisation du volant de badminton et du terrain de jeu. Associé à l’art du Feng Shui (littéralement « vent » et « eau »), les installations sont construites en rapport avec l’environnement, la scénographie et la spécificité des lieux. Elles prennent des formes à la fois animales, végétales et minérales et véhiculent la notion d’impermanence par leurs manifestations uniques. Le volant de badminton, fait de liège et de plumes d’oies/canards, s’est révélé être un objet de prédilection pour faire apparaître les deux énergies naturelles du vent et de l’eau. Suivant les environnements où les installations apparaissent, cet objet peut être regardé dans ses dimensions sportives, symboliques, poétiques, spirituelles, physiques, scientifiques ou politiques.
Dans un geste écologique et à travers un protocole de récupération inhérent à ma création, j’ai mis en place une boucle de récupération des volants usagés avec les clubs de Ligue de Nouvelle-Aquitaine de Badminton, tout au long des saisons. C’est une forme de développement durable reconnue par les fédérations française et suisse de Badminton. Je réutilise les mêmes matériaux volants, en augmentant leur nombre depuis 2012.
Un des propos de BILLGRABEN est de regarder les espaces comme les images, descriptions, organisations et systèmes atmosphériques, exprimant au plus juste le fonctionnement des caractères profonds de la nature humaine.
La question/la réponse se trouvent dans le mouvement avant de se rejoindre dans le sens.
« Je ne mène pas une vie, c’est la vie qui me mène » (Ella Maillard)
FLORHOF (Jardin des fleurs)
FLORHOF est un sentier intuitif vers des sources et des origines, entre géobiologie et généalogie, Feng Shui des troncs célestes et branches terrestres, offrandes et renouveaux. J’ai noté un jour quelque part : « les effets de la recherche sans fin que notre âme a sur nos vies ».
L’intuition des origines mène à un arbre. C’est quoi le bon chemin, le bon sens ?
Je regarde le parcours qui me met en mouvement durant plusieurs années, à travers les évènements auxquels j’ai participé : les expositions, rencontres improbables et fils de création. Je me rends compte que ces chemins artistiques et énergétiques qui apparaissent avec ma sensibilité/intuition, se rejoignent dans des lieux généalogiques très précis de façon naturelle, sans les chercher.
Un phénomène d’attirance des lieux.
Durant mes pérégrinations imprévisibles, j’ai été attiré par l’arbre centenaire où jouaient mes ancêtres, près de la librairie FLORHOF disparue, à Wädenswil en Suisse.
La découverte de cet arbre généalogique inattendu a été rendue possible grâce à plusieurs paramètres : une œuvre comme indice, un pendule, le toucher de l’arbre car il faisait nuit, et la rencontre d’une personne qui a permis de canaliser le temps et l’espace.
Peut- être ai-je été guidé par ce que portent d’invisible, les racines et radicelles de cet arbre ?
Une forme d’énergie sexuelle, les fréquences et vibrations artistiques, la confiance et la liberté dans l’inconnu, l’agir et le non agir, sont les co-facteurs du chemin que je suis.
Propos de FLORHOF : vidéo 4 :06 s https://vimeo.com/544993218
GRANDES LIGNES Ce que je SUIS, du verbe SUIVRE
J’ai choisi de regarder FLORHOF sous ces angles :
Cette exposition trace un chemin de la mémoire humaine profonde (ou pas), avec l’homme comme antenne. Les mémoires du corps et de l’esprit avec leurs traumas, leurs reconstructions et réinterprétations, entre rêves et cauchemars, circulent dans les lieux par lesquels nous sommes attirés depuis l’enfance. C’est un moment de présence sereine entre les constellations des racines, des origines et leurs transmissions. Placer des pierres pour, à la fois, ne pas perdre son chemin et poser la réalité d’un nouveau sentier. En ayant tout à fait conscience que le temps des oiseaux l’égrènera comme des miettes de pain ou comme l’érosion de la montagne Illgraben. On utilise précisément ces pierres d’ancrage en géobiologie afin d’activer une circulation d’énergie claire dans un lieu.
La mémoire se raconte avec le langage d’histoires personnelles, d’indices de formes universelles, de contes, dans des images d’enveloppe et de transformation. Réapparaissent l’ADN vertébral, les animaux de l’inconscient enfouis comme les reptiles à plumes présents dans toutes les civilisations (dragons et autres serpents volants). Peut-être une mémoire profonde du premier reptile volant « l’Archéoptéryx » ?
Historiquement, en Angleterre, l’objet « volant » a été reconstitué avec des plumes et un bouchon de champagne. Il provient du jeu de Poona en Inde. J’en ai fait des guirlandes de jasmin.
Les accumulations de volants étirent des formes qui peuvent être associées avec celles issues de la nature comme l’imagerie des cellules, de la théorie de l’épigénétique ou de la théorie des cordes. Les œuvres produites sont étrangement similaires à la composition micro/macrocosmique du monde.
Ici, Les volants peuvent s’apparenter aux différents états de l’eau, de glacier en torrent, de cascade en bisse, de fontaine en stalactite, de source en goutte d’eau, d’écume en flocon de neige, jusqu’au nuage. L’exposition se manifeste comme un endroit où peuvent se rejoindre l’océan et la montagne.
La circulation dans ce jardin évoque les paysages intérieurs du corps comme notre première maison sacrée. Chaque élément alimente les autres. Les éléments/œuvres qui ont chacun leur histoire propre, échangent des informations entre eux de façon anatomique, organique.
La langue parle à ses glandes, les intestins aux orteils, la salive à la colonne vertébrale,
le sexe à l’ hippocampe, les dents au sacrum, la tête de fémur aux mandibules ….
Les volants évoquent le souffle, la respiration : l’inspiration, le vide médian puis l’expiration. Certaines pièces permettent de visualiser les mouvements ambiants de l’air activés par la circulation du public.
FLORHOF égrène sa propre mesure. Les volants se composent, se dispersent, se rassemblent comme des secondes qui prennent leur espace. Le temps prend d’autres dimensions dans le processus de collection, de fabrication et d’installation artistique. Les mêmes gestes se répètent pour enlever la bande noire autour de l’œuf des volants, percer, couper, mettre dans les filets, enfiler comme des perles… c’est sans fin. Un moment de méditation libérant l’évolution d’idées sur des plages horaires qui n’ont plus de mesures quantifiables.
Nous sommes dans la cinquième saison du taoïsme, celle des récoltes. Cette saison considère l’importance des liens entre toutes les phases des saisons. Les unes portent les prochaines en elles : les feuilles et graines d’automne, les flocons d’hiver, les fleurs de printemps et les oiseaux d’été…
C’est la musicalité des œuvres qui donne le rythme.
GNOSSIENNES GLACÉES : un parallèle avec Érik Satie
Les volants sont des notes et les formes sont des partitions, recomposables et interprétables dans une idée d’infinitude. Les mesures n’existent plus, les nuances sont des mots poétiques.
Du crétois « Knossos », les gnossiennes sont liées à Ariane, Thésée, au Minotaure et à la mythologie grecque. « Le temps gnossien, c’est un temps immobile stoppé dans l’ostinato d’une chorégraphie et d’un rythme exclusifs à tout développement ». Les gnossiennes sont souvent considérées comme des danses. L'ostinato est un procédé de composition musicale consistant à répéter obstinément une formule rythmique, mélodique ou harmonique accompagnant de manière immuable les différents éléments thématiques durant tout un morceau. La Gnose est une approche philosophico-religieuse selon laquelle le salut de l’âme passe par une connaissance (expérience ou révélation) directe de la divinité, et donc par une connaissance de soi.
Les éléments de composition de cette œuvre sont appelés « Mues », assemblant des volants blancs et noirs dans les filets de badminton. Elles sont des portées se rapprochant de la composition des 7 gnossiennes de Satie et leur temporalité (ordre de composition).
Dans cette chapelle, les œuvres conçues comme des offrandes prennent tout leur sens, à la façon de colliers de fleurs ou de crânes. Cet espace sacré habite un temps assez vaste pour y accueillir une exposition BILLGRABEN, qui laisse apparaître les fleurs de sa structure.
Le terme de résurrection réapparaît au fur et mesure que je regarde le volant.
BILLGRABEN collecte et utilise des volants apparemment semblables mais qui comportent chacun des traces de vie différentes. Chaque volant est unique suivant les traces de raquette et de filet qu’il a endurées. C’est l’objet sportif qui reçoit les chocs les plus violents (jusqu’ 300 km/heure), si robuste et pourtant si fragile qu’après quelques plumes abîmées, il a fini sa fonction première. Je les récolte pour une nouvelle vie artistique. Ils poursuivent leur évolution dans des mues d’oiseaux, de serpent, de crustacés, de voix, de peaux… des masques et des parures, comme des œufs fertiles en éclosion, exprimant le moment des transformations possibles.
Ce sont des canards et des oies plumés, des oiseaux morts, qui voyagent leur deuxième vie. Des Phoenix, fondamentaux dans la visibilité du Feng shui.
Ou des anges
Ou des monstres
LES TSCHÄGGÄTTÄS
En face de L’ILLGRABEN se trouve la vallée profonde, sombre et encaissée du Lötschental où apparaissent les Tschäggättäs, une nuit par an. Des créatures gigantesques aux dents et au poils d’animaux. Plusieurs légendes les entourent.
C’est un carnaval, un rituel païen et expiatoire, incarné par des monstres montagnards incontrôlables qui piétinent et balayent énergiquement la terre pour faire naître le printemps.
C’est aussi, historiquement, un rassemblement des gens de la vallée qui recrée un troupeau d’êtres étranges et puissants, à la force brutale, pour faire peur aux envahisseurs.
C’est en même temps un rite initiatique pour les jeunes hommes qui endossaient ces costumes lourds, disproportionnés, afin de débarquer dans les maisons pour cueillir les filles qu’ils désiraient. Elles étaient prêtes à être enlevées du cocon familial, pas par le prince charmant mais par l’inconnu, un monstre derrière lequel se cachait un garçon probablement alcoolisé, mais lequel ? Peur et désir. Excitation et terreur.
Les Tschäggättäs sont des sorcières de 2m50, des êtres féminins incarnés par des hommes du Valais charpentés. Ils dévalent une transe de 4h jusqu’en bas de la vallée en faisant sonner leurs cloches, mettant la tête dans la neige à ceux qui ne sont pas des leurs.
À pratiquer comme un parcours initiatique, une performance.
Derrière l’illgraben, se trouve le village de Chandolin où a vécu Ella Maillard. Grande sportive, elle donna une place importante à l’aspect spirituel des choses et vécut en alternance en Inde.
Derrière Chandolin se trouve le village de St Luc où se dessine le sentier des planètes. Chaque pas représente 100 000 km dans l’espace. En face gronde le glacier de Moiry.